Décadence -

      Etant arrivée la veille, après m'être bien perdue dans la ville, au point d'arriver tard à Seme-School, je me suis retrouvée à être accueillie par des Uke à l'état pur, de vrais diamants bruts. Je pense les avoir effrayé par mon rang de Seme. Ils étaient si insupportables, comme si me tenir tête allait faire d'eux des êtres bien plus importants. Je ne comprend définitivement pas les gens, même en changeant de pays. Fatiguée d'avoir erré si longtemps de l'aéroport à l'établissement, j'étais ravie de pouvoir éventuellement aller dans la chambre qui m'était attribuée à l'internat. Il était tard, personne de l'administration n'était dans la possibilité de me donner l'information de quelle chambre je pouvais bien occuper. Génial. Je me retrouve donc à me traîner dans les couloirs en espérant trouver une chambre où squatter le temps de connaître le numéro de la mienne. Ce fut sans compter sur l'hystérie ambiante des êtres femelles qui s’arrêtèrent à mon apparence, je dois bien avouer, trompeuse. M'enfin, sincèrement, pourquoi est ce que certaines personnes voient bien que je suis biologiquement une femme lorsque ça ne m'apporte strictement rien, alors que lorsque j'aurais bien besoin qu'elles se posent au moins la question, y en a pas une pour faire cette possible déduction ?
Et c'est comme ça que là, maintenant toute suite, je me retrouve à courir, poursuivie par des filles stupides qui crient, je cite « Qu'un gars rôde vers leur dortoir, avec un air suspect ». Eh mais. Quel air suspect. J'ai tout de la personne blasée, j'ai même pas pris mon regard aguicheur cette fois ! Bref, mon sac a beau être plutôt léger, je commence à en avoir marre de le trinqueballer partout, surtout au pas de course. Je suis où maintenant ? Je comprend rien à comment est foutu c'bâtiment. Et voilà les dingues qui réapparaissent au bout du couloir, j'sais que je suis esthétique, mais je ne pensais pas trouver une horde de fan dès mon arrivée. Je suis fatiguéééééée. Bon, on va faire la technique de « tu m'vois plus, tu m'oublie » soit « fous moi la paix », ça , c'est une porte, et une porte, ça s'ouvre. Chambre 17.
Je me retrouve étalée à tenir la porte de l’intérieur pour être sûre que personne ne songe à m'extirper de l'endroit en question. Quel bordel, y a rien d'plus insupportable que des gens qui font sortir leur voix de façon si stridente et inutile. J'suis pas en état de me battre face à la folie d'ces fillettes prônant leur intimité – qui selon moi n'a aucun intérêt.

Oh.

Merde.
J'suis pas toute seule je crois bien. Je me trouve nez à nez avec un petit gars joufflu. Mais. Mais je le reconnais, c'est le petit Uke qui courait derrière un chat quand j'ai débarqué ! C'est donc sa chambre ici. Y en a qui ont la chance de pouvoir accéder à leur dortoir, faut il croire.

-Hm. J'reste ici l'temps qu'la tornade humaine dans l'couloir décide de finalement s'casser pour s'occuper d'ses fringues de demain.

Je m'assoie, exténuée. « Bienvenue dans mon nouveau chez moi ». Je tente un sourire, quelque peu crispé. Je crois que je n'dois pas essayer d'amadouer qui que ce soit vu ma capacité moindre à tenir debout.

"Pourquoi t'es la ? Et c'est quoi tous ses cris ? Qui t'as dis d'entrer ?"

Oulah. C'est qu'il mordrait. Moi qui voulait juste m’étaler de tout mon long en espace sécurisé, voilà que je tombe sur un être tout aussi hargneux que ce qui m'attend dehors. Encore un peu déboussolée par la chasse dont j'étais le gibier, je n'avais pas trop de quoi répondre.

"J'ai pas envie d'être désagréable mais, t-tu devrais partir. J'étais occupé..."

Ah. En même temps, un gars, tout seul dans une chambre vide, assez tard, pouvait bien être occupé par des. Mh. Envies solitaires. A l'idée qu'une chose, d'apparence si mignonne que lui, pouvait s'adonner à ce genre d'activité, je ne pu m’empêcher de rire.

- Ahahahah ! Ouh. J'crois qu'mes nerfs lâchent, je suis tellement fatiguée. Écoute, j'ai pas fais 10h de vol, en comptant le double pour me retrouver ici, ce pour me faire déchiqueter par des furies. Je partirais comme je suis venue dans quelques minutes. 

Mes yeux se fermèrent sans que je puisse même contrôler quoique ce soit. Je me retrouvais amorphe sur le sol de la chambre d'un type que je semblais terrifier, et qui avait tout pour projet, sauf me laisser tranquille. A croire qu'ils s'acharnaient tous les uns sur les autres ici. Qu'ils étaient toujours sur la défensive, ou un truc du style. Pourtant, je n'ai pas fais quoique ce soit, encore, pour qu'une telle attitude soit justifiée. Il n'est pas mon esclave, ou un truc du genre. D'ailleurs c'est fatiguant un esclave, toujours dans tes pattes, je comprend vraiment pas le concept. Tous ces gens sont des formes, des formes qui bougent, qui s'esclaffent, et se gonflent d'orgueil, pendant qu'le sommeil fait de moi un être tout aussi inutile qu'eux.

"Tu...tu veux te reposer?"

Sa voix commence à me paraître quelque peu éloignée. Je pourrais lui répondre en réalité, mais voir sa réaction me semble amusant. Puis dormir un peu ne me déplairais pas le moins du monde. Oh, mais, il me porte ! J'espère qu'il ne va pas en profiter pour palper mes quelques formes cachées sous les vêtements amples. Je suis sûre qu'il est moins innocent qu'il n'en a l'air. M'enfin. Le fait est qu'il a enfin compris qu'j'étais véritablement morte de fatigue, et que dormir était maintenant mon seul mot d'ordre. Je crois qu'il a même fermé la porte. J'imagine que c'est gentil.


"C'est qui dans les couloirs? Il s'est passé quoi?"

Un silence plane. Si je veux pouvoir occuper son lit jusqu'à trouver ma véritable piaule, il va bien falloir que j'y mette un peu du miens. J'entrouvre les yeux. Il ne le remarque pas je crois. Je vois de la pitié sur son visage. A croire qu'il n'a jamais vu quelqu'un qui n'a pas dormis pendant 48h.

- On a voulu me tuer. Parce que j'ai été trop proche du dortoir des filles en cherchant ma chambre. Et j'ai plus assez d'énergie pour démembrer celles qui m'ont poursuivi pour outrage à leur vie privée.

Je me demande si cette phrase est inquiétante, ou quelque chose comme ça. D'un côté, je préférerais lui faire peur plutôt que de lui inspirer de la pitié. Ou non, je préférerais qu'il m'accepte suffisamment pour pouvoir rester sur son lit si moelleux, c'est comme un rêve, un doux rêve. Je me sens partir de nouveau. J'espère ne pas baver dans mon sommeil d'ailleurs. Je me demande comment  est ce type. Enfin, s'il marquera suffisamment mon esprit pour que je me souvienne de lui demain. Je n'ai jamais été très douée pour me rappeler de qui sont les gens qui se mouvent autour de moi. Quoi qu'on oublie pas quelqu'un qui te prête son lit. C'est sacré un lit. Bon, d'accord, ce n'est pas une jolie fille prête à être séduite, mais, il a au moins le potentiel de ne pas avoir une voix trop agaçante ou quelque chose comme ça. Puis il court vite derrière les chats, il pourrait peut être me porter tout en courant jusqu'à ma chambre, ou... Ouaaah, je divague, je crois que mon cerveau est rongé par la fatigue.

"Mais.. dortoir... fille... évident..."

 Je ne comprend plus rien de ce qu'il raconte, ma tête se fait lourde, j'ai l'impression de ne faire plus qu'un avec le matelas. Je commence à voir des formes se créer dans mon esprit, et parler même, un début de rêve peut être ? J'ai l'impression d'être entrain d'halluciner à moitié éveillée, la fatigue a toujours eu de sales effets sur moi. Puis une voix claire troubla mes illusions psychique.

"Franchement.. s'occuper de quelqu'un qui n'a jamais été gentil avec moi..."

Je crois savoir d'où elle provient. Le petit a donc une dent contre moi? Je ne me souviens pas avoir fait quoique ce soit. Boh. Je m'en fous, j'ai un lit pour quelques heures, c'est l'essentiel.
Je me réveille en sursaut, il est quelle heure? Je suis où? Oh. Y a un gars, là, endormi au pied du lit! Me dites pas que j'ai fait ça, une fille, ce serait pas la première fois, mais un mec, joufflu en plus. Eh mais, c'est le petit qui courait derrière un chat quand j'ai débarqué, hier je crois? J'ai comme une impression de déjà vu. Ah c'est bon, je me souviens, ce petit Uke a eu la "gentillesse" de me cacher des furies. La soirée me paraît floue, mais je crois avoir la globalité des événements en tête. Je fini par me redresser. Puis, amusée, je ne pu m'empêcher d'ébouriffer le petit.

-" Alors comme ça je ne suis pas gentille avec toi?"

"Hm..bah..j-je.. je n'ai pas dis ça... enfin.. tu as rêvé..."

Je lâche un soupir. Il tremble. Je vois son visage plein de culpabilité, comme si sa langue allait pourrir sous le poids de son mensonge. Il commence à me fatiguer, ça doit déjà faire plusieurs heures que nous respirons le même air, ce serait dommage qu'il commence à suffoquer.

"J-je crois que la vague de filles est parti. Ça serait bête qu'elles restent là en même temps... Tu peux t'en aller si tu veux.."

Libre, plus de course poursuite à mon égare, ni même l'obligation de me cacher un peu trop près d'un être vivant de la même espèce que moi. Je vais pouvoir aller harceler l'administration pour avoir enfin accès à mon QG personnel. Je me lève péniblement, c'est une déchirure de m'éloigner de ce doux rêve. Je prend mon sac, puis passe devant machin, qui me vire littéralement de sa zone de confort. Il est tellement pâle. Peut être parce qu'il a mal dormis. Je me surprend à en lâcher un sourire narquois.

- Bonne année, bonne vie, et tout c'qui s'en suit. 

Je m'en alla alors, m'éloignant dans ces foutus couloirs, lui faisant un léger geste de la main.